Un établissement peu conventionnel
Cet article a paru dans la revue de langue chinoise, Tien-hia [ 天下 ], sous-titré Commonwealth, un mensuel des affaires de Taïpei.
Le siège social de la Banque foncière à Taïpei.
Créée il y a 40 ans, foncière de Taïwan, une banque publique au niveau provincial, a longtemps gardé la réputation d'une institution financière très conservatrice et conventionnelle. Toutefois, ces dernières années, une transformation révolutionnaire de ses méthodes et ses services ont remis cette banque dans la course et la compétition avec de Taïwan est devenue très vive. Les initiatives de foncière de Taïwan (une nouvelle méthode d'évaluations des biens et la promotion dynamique de sa campagne faire un nouvel emprunt et clore l'ancien) sont une réponse courageuse aux défis actuels.
Superbement soutenu par huit colonnes de dix mètres de haut, le fronton gris de foncière, légèrement battu par les intempéries, a été le témoin de profondes transformations depuis quelque quarante ans, après la fin de l'occupation japonaise. Les six caractères chinois, Taï-wan Tou-ti Yin-hang [ 臺灣土地銀行 ], c'est-à-dire Banque foncière de Taïwan, qui frappent très simplement ce fronton en proclament le nom.
En quarante années, foncière de Taïwan a transformé ses structures d'origine japonaise et a peu à peu gravi le chemin de la modernisation. Secouant le joug des conventions dont elle avait hérité, elle a élargi son réseau rudimentaire de cinq agences à aujourd'hui soixante et une. Dans le même temps, ses effectifs avaient augmenté de vingt fois.
En 1985, foncière de Taïwan a effectué une performance remarquable avec un chiffre d'affaires de 470 milliards de yuans taïwanais(*) - soit l'équivalent de 11,7 milliards de dollars américains -, un effort considérable depuis les timides 160 millions d'anciens yuans taïwanais de 1946 (ancienne monnaie alors en cours, depuis dépréciée et remplacée).
Et ce qu'on n'espérait guère cette année-là, cette institution a obtenu à nouveau des bénéfices meilleurs que toutes les autres banques locales, ce qu'avait bien prédit M. Sheu Yuan-dong (pron. Choô Yuann-Iong), président du conseil d'administration de foncière de Taïwan depuis presque deux ans maintenant.
Au second semestre de 1985, foncière de Taïwan a enregistré un bénéfice record d'environ un milliard de yuans taïwanais. Ce fut un bénéfice excédentaire de 300 millions sur les prévisions déterminées par le Conseil provincial de Taïwan qui régit les sept établissements bancaires provinciaux. Même de Taïwan, avantagée par les dépôts des revenus nationaux et des frais relativement moins élevés, n'a pu en atteindre le chiffre qu'on lui avait prévu. Elle s'est donc placée à l'ombre de foncière de Taïwan.
Jusqu'en 1982, cette dernière banque était un établissement provincial assez obscure. Cette année-là, ses bénéfices étaient tombés bien loin en deçà des prévisions. Ils étaient à moins de 1,2 milliard de yuans taïwanais du chiffre fixé, ce qui la plaçait à l'avant-dernier rang des sept banques provinciales. Il n'est donc pas surprenant que les trois années suivantes, les chiffres de foncière de Taïwan soient jugés extraordinaires par le Conseil provincial des sept banques. Les bénéfices, les dépôts et les prêts ont tous été autrement supérieurs à ceux des établissements frères tandis qu'elle parvenait à maintenir le plus bas taux d'intérêt pour les prêts à risques. En effet, le taux d'intérêt des prêts à risques de ces trois dernières années avait été de moins de 2% par rapport à la moyenne de 3% ou 4% chez les autres banques locales. Cela a en fait excité la curiosité des financiers qui avaient déjà crié d'un pessimisme tout professionnel. Selon eux, il n'était «pas à propos» de s'engager dans de telles opérations bancaires qui avaient tant de difficultés. Pendant ce court laps de temps, il est évident que, grâce à un optimisme et une souplesse vis-à-vis de la demande du marché, foncière de Taïwan a certes surmonté beaucoup de difficultés comme l'aurait fait tout grand organisme financier public, mais surtout, elle a restauré d'une manière sans pareille son image dans toute la province.
Les salons spacieux du siège social.
On a beaucoup souligné les leçons à tirer de ces récentes années. foncière de Taïwan a fait un grand pas en avant avec beaucoup d'initiative, de confiance et d'agressivité d'une façon totalement différente d'avec le conservatisme et le respect exagéré des conventions qu'on lui connaissait. On a voulu voir un lien important, presque direct, entre les activités de foncière de Taïwan et le climat socio-économique du pays. Quand le capital se resserrait, les prêts à moyen et long terme mettaient foncière de Taïwan dans une position plus désavantageuse pour l'encaissement des intérêts que les banques d'affaires opérant à court terme avec une clientèle des secteurs industriel et commercial. Cette situation s'est vite renversée dès que l'activité économique est redevenue plus stable. Actuellement, il y a eu net avantage pour le prêt à moyen ou à long terme qui est l'opération la plus stable et la plus sûre pour les revenus d'intérêts.
Le «programme spécial de prêt pour la construction immobilière», institué en 1981, passe aujourd'hui un cap important. Il avait été lancé par M. Li Chang chin (pron. Li Tchang-tchyinn), président de foncière de Taïwan depuis quarante ans - presque toute sa vie -, avec le concours de M. Chen Tang (pron. Tchenn Tang), directeur financier de la même banque. Ce dernier a souligné que non seulement ce programme avait amélioré la composition du capital de la banque, mais avait aussi fourni de nombreux éléments pour la formation continue, ce qui a pu considérablement rehausser la qualité des services. Il aime aussi rappeler que les hauts responsables de la banque, sous la direction de M. Li Chang-chin, avaient d'abord commencé une étude en profondeur pour définir le modalités de financement de ce programme. Ils y ont travaillé trois longues journées consécutives à l'issue des quelles ils avaient dressé un tableau complet pratique pour les prêts. Tout cela fut expédié au ministère des Finances pour examen et acceptation. Et cinq jours après l'approbation du ministère, toutes les agences provinciales de foncière de Taïwan affichèrent le programme.
En vue de regagner le soutien financier de centrale de Chine, foncière de Taïwan a octroyé plus de 56 milliards de yuans taïwanais de prêts divers en moins d'un an, soit plus que toute la valeur accumulée (50 milliards de yuans) au cours des 25 années précédentes. Il est remarquable que, depuis mars 1982, la direction des Postes de de Chine ait transféré 25% de l'épargne postale pour soutenir les prêts à moyen et long terme de foncière de Taïwan et permettre ainsi l'achat de logements.
A sa création, foncière de Taïwan se voulait financer les exploitations agricoles et forestières et d'aider le gouvernement dans la mise en vigueur de la réforme agraire. En 1980, le ministère des Finances autorisait foncière de Taïwan et trois autres banques à délivrer des prêts d'aide à la propriété foncière et à l'exploitation agricole. Elle restait toujours dans le domaine auquel elle était a priori destinée.
Aujourd'hui, foncière de Taïwan qui a dépassé ces limites possède la plus grosse part (60%) du marché des prêts-logement avec une clientèle qui occupe 53% des unités de logement achetées par prêt dans toute l'île. M. Sheu Yuan-dong, la soixantaine et 1, de haut, s'empresse de dire que, si sa banque est certes prête à tenir son rôle et ses fonctions dans les différents secteurs économiques en développement, il lui faut tout de même choisir un domaine particulier pour ne pas devenir une épicerie de gros. Les prêts fonciers et agricoles constituent 85% du chiffre d'affaires de la banque, beaucoup plus que les 60% exigibles d'une telle banque spécialisée et mandatée.
Cependant, elle est par essence une banque d'Etat à responsabilité limitée sous la tutelle du Conseil provincial de Taïwan sans l'approbation de qui elle ne peut rien entreprendre. Hormis les exigences budgétaires de la province, les banques provinciales doivent traiter de plus en plus les prêts risqués et compliqués. A cet égard, divers responsables de la banque se plaignent justement qu'il est extrêmement rare de pouvoir décider selon le point de vue du personnel intéressé. Devant de telles complaintes à propos des obligations de la banque envers l'Etat, M. Sheu Yuan-dong avait tranché que de tels problèmes ne les concernaient nullement puisqu'ils avaient à charge le haut rendement du personnel. Et c'est en tant qu’agent que la banque se tournera vers d'autres horizons.
La modification des méthodes d'évaluation des biens pour les prêts-logement par foncière de Taïwan fut une initiative audacieuse. Selon M. Sheu Yuan-dong, la banque n'a fait que suivre le courant social actuel en apportant au consommateur ce dont il avait besoin. Mais ce changement est bien la seule opération qui ait provoqué une telle agitation dans les milieux financiers nationaux l'an dernier. Les prêts-logement ont longtemps été la spécialité de foncière de Taïwan. Mais lorsque le capital s'est fait plutôt rare, toutes les banques ne se sont pas données la peine de rechercher le client pour les prêts-logement. Et foncière de Taïwan s'était raidie dans l'évaluation des biens selon les directives générales des banques locales. Les emprunteurs éventuels l'ont fréquemment critiquée durant cette période de n'avoir apporter qu'une aide parcimonieuse et soumise à trop de formalités. Elle était aveugle, disait-on, aux fluctuations des cours au moment de l'éveil de l'urbanisation de Taïwan. Cet irréalisme a contribué à geler les prêts fonciers qui étaient offerts au cours officiel, et non à celui du marché, selon une méthode discriminatoire en rapport avec l'âge de l'emprunteur.
Pour combattre cette attitude néfaste, d'une part, et pour rendre la confiance au marché des prêts-logement devenu plus compétitif, d'autre part, foncière de Taïwan a donc lancé l'an dernier un système d'évaluation des biens plus réaliste, basé sur la situation des immeubles dans la ville et sur les cours de l'ensemble des banques locales, lesquels reflètent plus exactement le marché actuel. Elle a pu récupérer une grosse clientèle pour le prêt-logement puisque tout emprunteur qualifié pouvait bénéficier d'un prêt jusqu'à 70% du cours du marché dans des conditions beaucoup moins rigides et moins formelles.
foncière de Taïwan a maintenu son élan avec les prêtslogement bien que de Taïwan et de municipale de Taipei (toutes deux, dépositaires de revenus nationaux) soient des compétiteurs sérieux ayant des frais moins élevés. Ces deux dernières sont entrées sur le marché des prêts-logements afin de rééquilibrer leur immense montant de prêts au consommateur. Cela a abouti en fait à une bataille rangée entre les banques.
Ces pressions nées de la compétition ont obligé foncière de Taïwan à baisser son taux d'intérêt annuel de 9,25% à 8,75%, puis à 8,25%, en vue de réduire la marge avec celui de de Taïwan. Ce nouveau taux a provoqué aussitôt une chute du même taux chez les autres banques. En conséquence, le consommateur pouvait acquérir son propre «château» au moyen d'investissements personnels relativement moindres.
Un dernier effort de foncière de Taïwan dans ce nouveau contexte est la campagne directe de promotion de prêts auprès du consommateur, «faire un nouvel emprunt et clore l'ancien». C'est tout un nouveau rythme pour une si vénérable institution.
M. Sheu Yuan-dong est directement arrivé du ministère des Finances à foncière de Taïwan. Il est bien sûr l'initiateur de la modernisation rapide des dernières opérations, d'aucuns faisant aimablement remarquer que partout où s'installe M. Sheu Yuan dong, il y a un changement en préparation. En tout premier lieu, M. Sheu Yuan-dong a convoqué un comité afin de définir les directives de service pour les employés et les fit mettre aussitôt en application dans toutes les agences de la banque. Les trois vice-présidents de la banque se fixèrent un calendrier pour effectuer à tour de rôle une visite dans les agences de l'île, recevoir leurs doléances, apporter une aide et une solution à leurs problèmes et surtout renforcer les intercommunications des agences.
Pour les cours de la nouvelle école de formation, on a apporté de nombreux matériaux et opérations, depuis la routine bancaire fondamentale jusqu'aux opérations financières d'avant-garde. Et un séminaire spécial de gestion d'un mois est certainement la pépinière de responsables. Ainsi, un bon tiers des 50 participants aux deux séminaires passés a été promu à une direction d'agence, un apport très rapide de sang neuf. Cependant, comme la formation est maintenant continue, la règle du Conseil provincial relative à la «simplication de l'organisation», qui stipule que les personnes qui ont fait deux années d'école de formation sont des employés à part entière, ne convient plus guère. Pour éviter le copinage dans la promotion des effectifs, M. Sheu Yuan-dong a ordonné qu'aucun employé ne pouvait plus être promu s'il n'avait d'abord occupé au moins trois ans une position d'un échelon inférieur. On aurait pu mettre en doute cette disposition, mais c'est un moyen efficace pour éviter les intrigues ou les manipulations de personnel. En effet, ces dernières pouvaient freiner quelques promotions de valeur justifiées. Mais maintenant, le nom de toute personne compétente ou de valeur peut parvenir aux oreilles du président, quel qu'en soit le cas.
Les clients de la banque ont tôt remarqué ce nouveau look. M. Hsu Cheng hsiung (pron. Chyu Tcheng-chyon), directeur adjoint de de Chine (China Rebar Company, Limited), qui maintient de longues et solides relations avec foncière de Taïwan, a loué le nouvel esprit d'initiative de cette banque, notamment les sages conseils à ses clients en matière bancaire, ce qui est un renversement complet de son attitude passée. Il a fait aussi état du rapide traitement des dossiers (les demandes du public, la gestion et le contrôle des prêts), actuellement près de deux mille en une journée. Il y a quelques années, il aurait fallu une ou deux semaines!
Afin de diversifier ses opérations, foncière de Taïwan s'est dernièrement mise à investir dans les bons étrangers pour 100 millions de dollars américains par l'intermédiaire de internationale commerciale de Chine (International Commercial Bank of China) et du Crédit central de Chine (Central Trust of China), tous deux autorisés à traiter sur le marché étranger, ce qui permet, d'une manière générale, de compenser les faibles taux d'intérêt du marché intérieur, a expliqué M. Cheng Shih-yang (pron. Tcheng Che-yang), vice président de foncière de Taïwan, qui a lancé l'opération. En même temps, les spécialistes en finance internationale reçoivent une formation sur le tas. foncière de Taïwan est ainsi devenue la première banque de crédit non étrangère à opérer dans ce domaine.
Dans des perspectives plus lointaines, si foncière de Taïwan veut rester en tête, elle doit se hausser sur la pointe des pieds, car le marché des prêts agricoles se rétrécie et la compétition est de plus en plus difficile pour les prêts fonciers.
«Nous avons la ferme volonté de bien voir tout cela», affirme le président
(*) Yuan taïwanais, ou mieux nouveau yuan taïwanais, est la traduction littérale, à partir des termes chinois, de la monnaie en cours à Taïwan. Sur le marché international, elle est plus couramment dénommée New Taiwan Dollar (ou NT$), soit nouveau dollar de Taïawan. Afin d’éviter toute méprise avec la monnaie américaine, il est conservé dans ce texte la toute permière expression pour faire référence à la monnaie légale de Taïwan.